Exposé

Les déficiences de la réforme Armée XXI au niveau de l’instruction – premiÈre partie

La restructuration imposée par la réforme Armée XXI a eu des effets directs à plusieurs niveaux sur l’instruction et la procédure de sélection de l’armée. Je me limite dans ce qui suit à la formation

Roland Borer
Roland Borer
Kestenholz (SO)

La restructuration imposée par la réforme Armée XXI a eu des effets directs à plusieurs niveaux sur l’instruction et la procédure de sélection de l’armée. Je me limite dans ce qui suit à la formation de base (cours de répétition), à la formation au commandement des cadres subalternes, au problème des instructeurs et au système des évaluations (assesstment) pour les cadres supérieurs de l’armée.

La mission de combat a été en partie supprimée dans les CR
La prolongation des écoles de recrues imposée par la réforme Armée XXI a eu des effets positifs sur le niveau de formation des militaires dans la cadre de l’instruction de base. Mais la durée variable des écoles de recrues en fonction des différentes armes a aussi eu des conséquences indésirables comme, par exemple, la tendance des conscrits à se presser dans les armes exigeant une école de recrues plus courte. Il est aussi inquiétant de constater qu’il existe des armes basées sur une formation réduite (par exemple, le génie) et dont le programme d’instruction ne comprend plus la mission de combat.

L’illusion de la montée en puissance
Le verbiage des responsables du DDPS concernant la montée en puissance est très mauvais pour l’instruction militaire de la troupe. Il est nocif pour la motivation quand même des documents de fond du département et de l’armée annoncent un délai d’alerte de dix ans durant laquelle les lacunes en termes d’équipement, d’armement et d’instruction peuvent être comblées. L’argumentation de la montée en puissance sert surtout à dissimuler des manquements. Dans le cas du conflit en Géorgie – une intervention militaire classique – le délai d’alerte a été quasiment zéro. Si l’objectif est de former une armée capable de soutenir une guerre, la notion de montée en puissance doit immédiatement disparaître du vocabulaire militaire. Compte tenu des capacités restantes de l’industrie d’armement suisse, cette idée confine à l’absurdité. Elle a aussi servi d’argument aux milieux politiques qui procèdent depuis des années à un minage financier systématique de l’armée. Le budget du DDPS présentant la plus faible proportion de dépenses liées de tous les départements fédéraux, on a pioché sans vergogne dans les crédits militaires, par exemple pour satisfaire les rêves que caressent des romantiques de tout bord en politique sociale et de l’éducation. La sécurité du pays est la première à en pâtir – encore heureux que nous vivions en période de paix!

Psychologisation excessive des cadres
La formation au commandement pour cadres subalternes s’articule autour de la dite création de compétences. Elle se base avant tout sur des connaissances spécialisées théoriques. En revanche, la véritable formation au commandement passe au second plan. Des commandants de troupes expérimentés sont d’ailleurs sceptiques devant ce modèle de formation et lui reprochent une « psychologisation excessive » des cadres.

Mauvaises conditions de travail des instructeurs
Les conditions de travail des instructeurs, donc des enseignants militaires de l’armée, se détériorent depuis des décennies et le DDPS ne parvient pas à combler les lacunes croissantes dans les effectifs du corps des instructeurs. Depuis le passage au dit modèle « des trois départs » pour les écoles de recrues, la situation s’est rapidement dégradée.

Sur le plan matériel, il faut enfin introduire un système de classes de salaires uniforme, adapté aux prestations et transparent pour les instructeurs.

L’obligation de faire du service à l’étranger, qui figure désormais dans les contrats de travail des officiers de carrière, fait perdre à l’armée un nombre important d’instructeurs de qualité (des pères de famille notamment). Cette contrainte est aussi en contradiction avec la promesse faite avant la votation populaire que les engagements à l’étranger seraient exclusivement assurés par des volontaires.

La détestable coutume des évaluations
L’exigence d’une évaluation (assessment) pour la promotion d’un officier de carrière est devenue une procédure aussi inutile qu’excessivement onéreuse. Ce système sert avant tout aux cadres proposant un officier pour une promotion à rejeter leur responsabilité sur d’autres. A l’ombre de cette détestable coutume, on a vu éclore un système très complexe de copinages où l’on se pousse mutuellement et où les capacités et compétences réelles des candidats passent au second plan. Un officier ne doit pas être promu à une nouvelle fonction sur la base d’une telle évaluation, mais sur proposition de son supérieur qui assume ensuite personnellement la responsabilité de sa proposition

Pour les promotions au niveau suprême de l’armée, les évaluations constituent de toute manière un instrument inadéquat. Cette responsabilité doit être assumée par des généraux auxquels le Conseil fédéral peut se fier en procédant aux promotions qui lui sont soumises. Il s’est en effet avéré que ces évaluations ne permettaient pas de déceler des défauts de personnalité et de caractère.

Roland Borer
Roland Borer
Kestenholz (SO)
 
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