éditorial

L’analyse politique de l’affaire Hildebrand commence maintenant

Philipp Hildebrand, président de la Banque nationale suisse (BNS), a démissionné hier. Cette décision était juste et inévitable. Le principal gardien de la monnaie nationale n’a le droit ni de…

Philipp Hildebrand, président de la Banque nationale suisse (BNS), a démissionné hier. Cette décision était juste et inévitable. Le principal gardien de la monnaie nationale n’a le droit ni de conclure des affaires privées de devises, ni de négocier des titres d’entreprises de son pays. Pareilles activités risquent en effet influencer les décisions monétaires de ces hauts responsables dont les choix peuvent influencer les cours de change, les taux d’intérêt et les cours des actions. Voilà le fond de l’affaire Hildebrand qu’on ne saurait tout simplement classer aujourd’hui. Car les autorités de surveillance de la BNS ont-elles aussi échoué. Une banque d’émission crédible a besoin d’une surveillance forte. Il est donc indispensable qu’une Commission d’enquête parlementaire (CEP) analyse en détail toute cette affaire et que les Chambres fédérales se réunissent en séance extraordinaire pour examiner les interventions parlementaires concernant la BNS.

L’affaire Hildebrand est regrettable. On assiste régulièrement à des défaillances personnelles à des postes à haute responsabilité, en Suisse comme dans d’autres pays. Les affaires von Guttenberg et Wulff sont très présents dans les esprits. Mais des cas de ce type s’aggravent quand des instances hiérarchiques supérieures ou des autorités de surveillance tentent de minimiser le problème ou de retenir des faits par une information sélective du public. Tel a malheureusement été le cas dans l’affaire Hildebrand. La Banque nationale elle-même a informé le 23 décembre en ne dévoilant que certaines parties de l’affaire, voire en arrangeant la réalité des faits d’une manière extrêmement discutable. Des informations supplémentaires ont été diffusées le 1er janvier de sources manifestement proches de la BNS via la presse dominicale pour mettre en place de nouvelles lignes de défense. On n’a même pas hésité à évoquer le « spectre de l’UDC » pour tenter de transformer l’affaire Hildebrand en une affaire Blocher/UDC/secret bancaire. Lorsque Christoph Blocher et l’UDC étaient la première fois intervenus en public jeudi dernier après la conférence de presse de Philipp Hildebrand, la campagne de relations publiques pilotée par la BNS s’était déjà effondrée. Les faits confirmés par la BNS elle-même pesaient trop lourds et les tentatives d’explication étaient trop contradictoires. Cela n’a pas empêché le Conseil de la banque et le Conseil fédéral de soutenir comme par réflexe le président de la BNS alors que ces autorités devaient être conscientes depuis longtemps de la gravité de cette affaire et des responsabilités qu’elles y assument.

 

Retour à l’essentiel

« La Banque nationale suisse conduit en tant que banque centrale indépendante la politique monétaire du pays. Conformément à la Constitution et à la loi, elle doit viser l’intérêt général du pays en cherchant en priorité à garantir la stabilité des prix tout en tenant compte du développement conjoncturel. Elle fixe ainsi les conditions-cadres fondamentales pour le développement de l’économie »(trad.). Voilà le mandat de la Banque nationale. La conduite de la politique monétaire passe par la fixation du taux d’intérêt LIBOR pour les placements en francs. Par ses interventions, la Banque nationale influence donc directement et indirectement les taux d’intérêt et cours de change ainsi que l’évolution de la conjoncture. Un membre du directoire de la Banque nationale, qui est censé prendre des décisions de fond, doit être totalement libre de tout conflit d’intérêts. S’il détient à titre privé des sommes importantes en devises étrangères ou des actions d’entreprises sises en Suisse ou s’il négocie ces valeurs, ses décisions professionnelles en seront forcément influencées. On ne peut en aucun cas accepter cela. En fait, ce constat est tellement évident qu’il ne devrait même pas être nécessaire de le fonder sur des lois ou des règlements.

 

Que faut-il faire?

Ce qui compte avant tout aujourd’hui, c’est de renforcer la confiance dans la Banque nationale. Pour cela, il faut rapidement analyser cette affaire et en tirer les conclusions qui s’imposent. L’intégrité des membres du directoire de la Banque nationale ou du Conseil de banque de la BNS ne doit pas susciter le moindre doute. Il s’agit aussi de tirer les conclusions des défaillances des autorités de surveillance, soit du Conseil de banque et du Conseil fédéral. La surveillance doit être renforcée. Si nécessaire, il faudra adapter les règlements et vérifier l’opportunité d’une réforme légale. Il faut éviter qu’un tel cas puisse se reproduire. Les instruments les plus indiquées pour analyser rapidement ce cas sont une CEP et une session parlementaire extraordinaire où pourront être examinées les interventions parlementaires concernant la BNS. Durant les mois écoulés, l’UDC a réfléchi intensément au renforcement de la BNS et elle a déposé plusieurs interventions parlementaires concernant le champ d’activité de la BNS, la surveillance de la Banque nationale, son engagement international et la fixation d’une limite à l’endettement de la BNS.

 

Et le secret bancaire?

Une éventuelle violation du secret bancaire dans le cadre de l’affaire Hildebrand a été évoquée à plusieurs reprises ces derniers jours. Si effectivement le secret bancaire a été violé, il va de soi qu’une action judiciaire doit être ouverte et que les coupables doivent être punis. Mais le fait que le Conseil fédéral déclare bruyamment qu’une « enquête sans pitié » devra avoir lieu ne manque pas d’un certain ridicule. En effet, c’est le Conseil fédéral qui a systématiquement miné le secret bancaire ces dernières années, par exemple en remettant aux Etats-Unis des données de clients de banques suisses. L’UDC continuera de défendre avec véhémence le secret protégeant les clients des banques.

 

La Suisse a besoin d’une BNS forte

L’UDC est convaincue qu’une Banque nationale forte constitue une base importante pour une Suisse souveraine et économiquement performante. Elle a donc toujours lancé dans le débat politique des propositions visant à renforcer la BNS et elle continuera de le faire durant les semaines et mois à venir. Mais elle n’hésitera pas non plus à dénoncer des disfonctionnements et des problèmes. La surveillance insuffisante de la BNS en fait partie. Seule une politique courageuse renforce nos institutions. Si les leaders des autres partis politiques accusent aujourd’hui l’UDC de vouloir déstabiliser les institutions, c’est uniquement parce qu’ils ont été eux-mêmes incapables de contribuer à la stabilisation et parce que leur comportement a trop longtemps couvert des disfonctionnements.

 

 
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