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Le rapport « Service public » totalement décevant

Publié aujourd’hui, le rapport "Service public" du Conseil fédéral déçoit sur toute la ligne. Ce texte annoncé avec grandiloquence comme instrument d’une "discussion ouverte" comporte en réalité de grosses lacunes et reprend unilatéralement le point de vue de la SSR. L’essentiel des réflexions du Conseil fédéral se résume en un bétonnage du statu quo, une extension des activités de la SSR et d’autres mesures du même cru. Cette démarche repose sur une grossière erreur de fond, car l’énorme diversité médiatique actuelle, qui est notamment le résultat de la numérisation, exigerait bien plus une réduction des interventions de l’Etat. De gros efforts seront encore nécessaires pour faire avancer sérieusement le débat sur le service public. 

Gregor Rutz
Gregor Rutz
conseiller national Zürich (ZH)

La numérisation et le développement technologique ont modifié en profondeur le paysage médiatique. Les consommateurs profitent aujourd’hui d’une offre et d’une diversité encore jamais vue, notamment dans le domaine des médias électroniques. C’est dans le contexte de ces changements que le débat sur le service public doit être mené. Cette discussion doit déterminer quelles prestations doivent toujours être produites par l’Etat et quelles autres peuvent être réalisées par le secteur privé. Mais le Conseil fédéral élude systématiquement ces questions.

Après la publication il y a quelques mois du rapport décevant de la Commission fédérale des médias, cette nouvelle publication du Conseil fédéral n’a quasiment rien apporté de nouveau. On n’a toujours pas compris les signes du temps. On refuse de développer des variantes sérieuses et des scénarios alternatifs. Nulle trace d’une réflexion sur la manière de réduire les activités de l’Etat face à une offre toujours plus diverse. Le Conseil fédéral n’est guère intéressé non plus à un renforcement de la concurrence. Son unique souci est de consolider la position de la SSR afin que celle-ci puisse "résister à la concurrence internationale". C’est oublier que la SSR, compte tenu de son mandat de droit public, n’est de toute manière pas dans une situation de concurrence. Pas question non plus dans le projet gouvernemental d’une amélioration des conditions-cadres pour les médias privés. Or, un renforcement de la concurrence serait non seulement utile, mais absolument nécessaire notamment dans le domaine du divertissement, mais aussi des sports. 

En outre, les propositions du Conseil fédéral concernant internet sont extrêmement déroutantes. Le gouvernement souhaite étendre l’offre en ligne de la SSR, subventionner des producteurs en ligne privés et régler légalement le secteur de l’internet. Or, ce marché est en pleine croissance et l’offre sur internet est remarquablement diverse. C’est dire l’absurdité de cette démarche de la Berne fédérale qui s’inspire directement de l’économie planifiée. Il n’est pas nécessaire d’étendre la LRTV pour en faire une "loi sur les médias" englobant également internet. Bien au contraire: la dérégulation et le renforcement des libertés entrepreneuriales sont importants dans une démocratie moderne. 

Ce sont ces points qui devront être thématisés. Il faudra discuter des nombreuses interventions parlementaires pendantes et proposer des variantes. Citons à ce propos les postulats Rickli (variantes budgétaires), Wasserfallen (principe de la solidarité) et Romano (limitation de l’offre en ligne) ainsi que la motion Maier/Bäumle (plafonnement du produit des redevances). L’ordre du jour de la CTT comprend encore les initiatives parlementaires Müller (compétence de l’octroi de la concession SSR) et Rutz (réduction des activités non couvertes par la concession). Enfin, les demandes de l’UDC de mettre en place un système dual et de rétablir la transparence concernant les finances de la SSR doivent également entrer dans le débat. 

Conclusion: le rapport du Conseil fédéral ne peut servir de base à une discussion sérieuse sur le service public. Les promesses que le Conseil fédéral a faites durant la session spéciale de décembre 2015 n’ont pas été tenues. Il appartient maintenant aux commissions parlementaires concernées de corriger ce mauvais cap: elles doivent dégager la voie à un débat large et ouvert sur le secteur médiatique. 

 

Gregor Rutz
Gregor Rutz
conseiller national Zürich (ZH)
 
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